Les 4 nobles Vérités 1 







  1. -1 Première vérité:  La vie est souffrance (physique et/ou psychologique).


Le mot "dukka" n'indique pas la souffrance dans le sens habituel. Il faut plutôt l'entendre comme une forme d'insatisfaction, de mal-être, d'inconfort, de frustration.


" La naissance est une souffrance, la vieillesse est une souffrance, la maladie est une souffrance, la mort est une souffrance, être séparé de ce(ceux) que l'on aime est une souffrance, être uni à ce(ceux) que l'on n'aime pas est une souffrance. On souffre physiquement et mentalement, on souffre des changements, on souffre de nos habitudes, on souffre de notre avidité ."1


La douleur fait partie intégrante de la vie, qu'on le veuille ou non. Physiquement même si nous sommes en très bonne santé, il arrivera un moment où nous serons malades, où nous pourrions avoir ou nous aurons un accident, où notre corps vieillira et finalement un moment où nous mourrons.

Mentalement et moralement, il y aura des moments où nous perdrons un être cher, un moment où nous divorcerons, où notre entreprise ou ce que nous attendons ne fonctionnera pas comme nous le voulons, où nous devrons supporter des choses, des gens qui nous sont désagréables, un moment où quelque chose se détraquera dans notre vie, dans nos relations, un moment où nous serons touché par ce qui arrive aux autres, par ce qui arrive dans le monde.

Ce à quoi s'ajoute une souffrance existentielle que beaucoup évitent par différents stratagèmes : en adhérant à des croyances religieuses ou athées, en développant des hypothèses, des théories, en se racontant des histoires (le ciel, l'enfer, la renaissance etc...), en s'adonnant à des addictions tels que le jeu, le sexe, l'alcool, les drogues, le numérique obsessionnel etc...

Comment suis-je arrivé là? Qui suis je? D'où viens je? Où vais je? Qe deviendrai-je après la mort ? A quoi sert tout cela ?

Si Dieu existe pourquoi y-a-t-il tant de guerres, tant de misère ? Qu'est ce qui fait  tourner le monde ? Quel sens a tout cela ?

Autant de questions auxquelles personne ni aucun système ou religion, n'a de réponse quoi qu'on en dise !

Nous ne pouvons pas être satisfaits des réponses que l'on nous donne ou que nous nous donnons à ces questions. Ce qui entraine de la souffrance.

Personne n'est jamais à l'abri d'une souffrance.

Reconnaître et admettre la présence de cette souffrance est nécessaire pour s'en libérer. Il y a des questions auxquelles nous n'aurons pas de réponse. Inutile de se les poser. Expérimentons le présent tel qu'il est.

Plus l'homme cherche quelque chose de permanent auquel il puisse s'attacher dans ce monde éphémère, plus il souffre.

  1. -2 Seconde vérité:  Il y a une cause à cette souffrance: cette cause est l'attachement aux désirs, le refus de l'impermanence (anicca) et de l'interdépendance.

La majorité des êtres humains voudraient que le confort, la sécurité, le bonheur dont ils bénéficient soit établi une fois pour toute.

Quoi que l'on fasse, il n'en est rien, personne n'échappe au changement. D'où ce besoin qu'ont la plupart d'entre nous à manipuler la réalité, et les autres, pour garder le contrôle, faire en sorte que ce qu'ils souhaitent perdure. Ce besoin de développer des croyances, des stratégies, de jouer du pouvoir afin de garder le contrôle sur la réalité.


D'où cette tendance dans certaines religion à invoquer un "paradis" où il n'y a plus de problème. J'aie entendu des prédicateurs un peu partout dans le monde dire aux "fidèles" qu'il fallait demander l'aide de dieu pour accepter la misère dans laquelle ils vivent, parce qu'après grâce à leur foi ils iront "au paradis" où cette misère n'auraplus lieu. Il faut vraiment être naïf pour croire ces choses.


Après avoir reconnu et accepté notre souffrance, nous avons besoin de regarder profondément en elle pour savoir d'où elle vient

La grande majorité d'entre nous pensent que l'origine du bonheur et de la souffrance sont extérieurs à nous, dans l'objet de nos désirs, comme si c'était les autres, les événements, les objets (les possessions) qui nous rendent heureux ou malheureux et font de nous ce que nous sommes.

Nous comptons donc sur les autres ou les objets extérieurs pour être heureux, et ne voulons surtout pas que cela change.


Par exemple

  1. je suis heureux ou je ne me sens bien que lorsqu'il fait beau et je suis maussade lorsqu'il fait gris ou qu'il pleut. Ce n'est d'ailleurs pas pour rien que l'on dit qu'il fait mauvais temps. Pourquoi le temps serait-il mauvais ?

  2. Un enfant se sent bien ou aimé lorsque ses parents lui achète tout ce qu'il veut et se sent abandonné, méprisé lorsqu'il n'obtient pas ce qu'il désire...

  3. certains parents sont heureux quand leur enfant travaille bien à l'école et sont déprimés ou irrités lorsqu'il a de mauvaises notes, etc....

  4. Certains d'entre nous pensent ou disent ne pas pouvoir être heureux lorsqu'ils voient à quel point le monde va mal. D'où la sinistrose dans laquelle les médias, et les lobbies nous entretiennent pour nous rendre plus dépendants, plus malléables, avec d'énormes besoins de compensation.


Persuadés que le bonheur est situé "en dehors" de nous, dans les possessions, dans les situations, ou les personnes, nous désirons et essayons d'obtenir ces choses, ces personnes, de même que nous essayons d'éviter tous les objets et les individus qui nous rendent malheureux parce qu'ils semblent être la cause de notre malheur.


Croire que le bonheur et le malheur proviennent de choses ou de personnes extérieures nous met dans une situation paradoxale, parce qu'il est impossible de contrôler complètement les individus et les choses qui nous entourent.

Nous nous démenons pour obtenir ce que nous désirons, mais cela n'est jamais assez ou comme nous voudrions que cela soit.

Bien sur qu'il y a des gens capables de provoquer du malheur : des tyrans, des terroristes, des opportunistes, des conjoints(e)s, des pervers. Mais un tyran seul ne peut rien faire, des terroristes seuls ne peuvent rien faire, un conjoint violent seul ne peut rien faire si on ne le laisse pas faire. Il y a toujours un système composé de personnes qui accepte ou permet que cela se produise. Qui a déjà affirmé (avec mesures assorties) que le droit à la vie est un  droit non négociable ?


Nous sommes tous confrontés à un certain nombre de faits que nous n'avons pas choisis. La majorité d'entre nous aimeraient avoir le contrôle sur tout ce qui nous concerne et parfois sur ce qui ne nous concerne pas.

Les autres n'étant pas comme nous voudrions qu'ils soient, nous sommes frustrés dans nos tentatives pour les faire changer.

Constamment déçus, nous en voulons toujours plus que ce qui est censé nous rendre heureux. Ce à quoi nous encourage l'économie moderne dans sa course à la consommation.

D'autres finissent par ne plus rien désirer par dépit ou impression de ne rien pouvoir maîtriser, par dépression.


Lorsque nous obtenons plus ou moins ce que nous souhaitons, nous voudrions que cela soit éternel, que cela dure tout le temps.

Comme rien ne dure, tout est en mouvement constant, ce que nous avons acquis change, disparaît ou ne nous satisfait plus, d'où cette quête insatiable, entraînant la souffrance. Ce qu'exploite l'économie moderne avec l'obsolescence programmée.


Y-a-t-il une personne riche ou célèbre qui soit entièrement satisfaite? A voir le nombre de personnes riches et célèbres qui se suicident ou sont en addiction (au sexe, à la drogue, à l'alcool, à l'argent, au succès etc...) ce n'est pas évident !

Y-a-t-il une personne qui soit totalement satisfaite de ses amis, de son entourage, de sa situation, de son travail ?


Nous ne pouvons faire l'économie d'un retour sur soi, de comprendre ce qui dans notre histoire nous conduit à cette insatisfaction, à la transformation de nos désirs en besoins compulsifs ou inversement à l'abandon de toute appétence.


- 3 Troisième vérité :  Il y a un moyen d'endiguer cet attachement aux désirs et donc la souffrance qu'il entraîne.


En découvrant l'origine de notre insatisfaction, nous pouvons agir sur les causes de notre souffrance, pour nous en libérer.


Le nirvana est l'apaisement du désir, non par sa suppression, que l'on atteint par le détachement à l'égard de l'objet du désir. Il est la cessation de l'ignorance qui nous fait souffrir et non un paradis comme tout le monde l'imagine.

A quoi sert de se morfondre toute la vie parce que notre mère ou notre père ne nous ont pas aimé comme nous aurions voulu ? A quoi sert de souffrir tout le reste de sa vie d'avoir perdu une fortune, un bien, un défi ? A quoi sert de se lamenter sur son sort,  si on ne fait rien ou si on ne peut rien faire pour qu'il change ?

Le nirvana correspond davantage au renoncement d'un désir en tant qu'attachement, qu'à sa satisfaction. Il suppose l'acceptation de ce qui est et de ce qui n'est pas, et de ce que nous ne pouvons pas changer (inéluctable).

La prise de conscience du désir a pour effet le détachement et la libération des choses qui nous obsèdent.


Ce qui revient à s'abstenir de faire les choses qui nous font souffrir.

Cette libération se produit dans la vie actuelle, dans l’instant, pas forcément avec ou après la mort.


Acceptation, détachement, lâcher prise sont des clefs de la libération et de la paix.


Si Bouddha reconnaît l'existence de la souffrance, il reconnaît aussi l'existence de la joie et du bonheur.


Penser que selon le bouddhisme, on évacue la souffrance mais aussi le plaisir est exactement le contraire du message.

Il a montré comment reconnaître et admettre la présence de la souffrance, mais il a aussi enseigné comment faire cesser cette souffrance pour parvenir au bien être et à la joie.


Nos projets et nos rêves ne se réalisent qu'en partie, voire pas du tout. Ce qui maintient en vie est la tension vers la réalisation, pas forcément la réalisation de tous les désirs. Ce que défend également la psychanalyse.

C'est ce que la société de consommation nie en nous persuadant que nous devons réduire l'écart entre le rêve et la réalité pour être heureux, à n'importe quel prix. L'homme qui consomme plus vivrait mieux et serait mieux considéré que celui qui consomme moins !


Nous croyons être ce que nous pensons, possédons, faisons. Un ego, pas toujours équilibré, est aux commandes de notre vie, induisant une distorsion de la réalité.

Lorsque nous avons ce que nous voulons, nous sommes comblés, dans le cas contraire, nous sommes déçus, déprimés, frustrés, d'autant plus violemment que nos sociétés prônent le culte de la possession et de l'immédiateté.

C'est donc, et surtout, en changeant notre façon d'interpréter et de considérer les individus et les phénomènes que nous pourrons modifier l'expérience que nous en avons.


Un de mes enseignants disait "si tu ne peux pas changer le monde, change au moins le regard que tu portes sur le monde et tu verras que le monde change."

Nous pouvons reconnaître nos projections, voir en quoi nous avons surestimé et sous-estimé les choses, les autres et nous mêmes.

Lorsque la perception devient plus réaliste, elle apporte davantage de satisfaction. En re-devenant nous mêmes nous nous libérons de l'emprise des diktats.

En abandonnant les conceptions (idées) erronées qui conduisent à l'attachement, à la colère, à l'étroitesse d'esprit, à l'orgueil, à la jalousie, nous tendons vers un regard plus juste sur les autres et sur les possessions et une vision plus profonde sur nous même.

Nous pouvons être heureux même si le monde va mal, même si nos enfants ne sont pas conformes à ce que nous attendons, même si nous n'avons pas tout ce que nous souhaitons. Nous pouvons être joyeux, le partager, le communiquer.

Certains pensent que c’est à ce moment là que nous nous libérons des cycles de renaissances.


Tout le monde aspire au bonheur, même les personnes qui se suicident. En se donnant la mort, on cherche (encore une fois à l'extérieur) un mieux être par rapport à ce qu'on est en train de vivre, ou on fuit un mal être intérieur en le quittant.

Certaines personnes mises au pied du mûr par une maladie grave, décident de changer radicalement de façon de vivre et quittent tout pour réaliser un rêve. Ce qui parfois interrompt la maladie. Les suicidaires devraient avoir cette ressource : "avant de me supprimer je ferais bien le tour du monde" ou "je ferai bien cette petite folie que je n'ai jamais osé faire".

Peut être que cela changerait bien des choses.


  1. -4 Quatrième vérité : Le moyen d'éradiquer la souffrance est le Noble Chemin Octuple,

C'est une façon de penser, d'être et d'agir au quotidien.

C'est l'application concrète des 4 Nobles vérités dans la vie quotidienne. Il ne s'agit pas de recettes de magazines pour trouver le bonheur ou se réaliser. Il ne s'agit pas d'un mode d'emploi  pour atteindre quelque chose, mais d'indications pragmatiques pour sortir de la souffrance. L'objectif est de permettre aux gens de développer l'art de "voir" et d'appréhender la réalité et de l'appliquer dans la vie quotidienne. C'est cette façon de voir qui sous tend la définition du mot juste.


Le Noble sentier Octuple conduit à s'abstenir de faire les choses qui nous font souffrir, et font souffrir les autres.

Il nous conduit également à mettre en oeuvre une manière d'être et de vivre qui apporte paix et sérénité.

C'est un ensemble de pratiques qui fondent un cadre, ce qui fait dire à certains que nous y trouvons la sécurité dont notre névrose aurait besoin. Or toute personne à besoin d'un cadre, d'une base pour se construire et se lancer à la conquête du monde et de soi même. Le fameux tiers symbolique des psychanalystes.

La différence fondamentale est que ce cadre ne repose ni sur des croyances, ni sur des idéologies (politiques ou religieuses), ni sur des principes élaborés par des hommes, ni sur sur l'avis de qui que ce soit. Ce cadre n'est pas acquis à travers une éducation ou un endoctrinement. Il se construit individuellement à partir du moment où vous saisissez la réalité, qui donnera sens à vos actions, à vos propos, à votre façon de vivre.

Son principe de base est la présence consciente à ce qui est, en soi, et à l'extérieur de soi.

L'acceptation et l'intégration de ces quatre vérités n'est pas facile pour l'homme moderne attaché à la recherche du bonheur, la société moderne étant entièrement vouée à  exploiter et manipuler les fragilités, les parts de vide ou d'absence de sens, les insatisfactions dont nous souffrons.

Penser que le bouddhisme est une pratique doloriste, pessimiste, de privation et d'abnégation, voire de négation de soi-même, est inverse à ce que propose la pratique.

La voie bouddhique, qui est celle du Noble Chemin Octuple, est le chemin que le pratiquant suit tout au long de sa vie, afin de vivre dans son propre corps, dans son coeur, dans son environnement, en pleine conscience et de comprendre avec sa propre intelligence les éléments de vérité fondamentale qui se manifestent dans le présent.

L'essence des enseignements est simple, universelle, parfaitement applicable dans la vie courante : nous devons prendre soin de nous et aider les autres de notre mieux, en évitant de causer du tort.

Derrière chaque pratique ce qui est visé est l'amour inconditionnel pour soi, pour les autres, pour la vie en général et la sagesse dans sa définition la plus universelle : l'acceptation de la vie comme elle est, la connaissance de soi, l'apprentissage du discernement, la capacité à vivre dans le présent, la compréhension et la maîtrise des pulsions, des désirs, la capacité à penser par soi-même, à faire des choix. C'est le bon sens. Ce n'est ni mystique, ni magique, ni irrationnel, ni dogmatique.


"Le but de la vie n'est pas de trouver le bonheur, finalement, mais de devenir soi. Celui qu'on est depuis notre naissance, et qu'on n'a jamais eu le courage d'être par manque de confiance en soi." 2



1 Sutta Pitaka - Majjhima Nihaya - Saccavibhanga Sutta

2 Moussa Nabati - le bonheur d'être soi- Fayard- 2006

 

Introduction
Histoire
Enseignement
4 nobles vérités
Noble sentier octuple
Vue Juste
Pensée juste
Attention juste
Parole juste
Action juste
Effort juste
Concentration juste
Moyens d'existence justes
Idées reçues et paradoxesBouddhisme_laic_introduction.htmlBouddhisme_Histoire.htmlBouddhisme_Enseignement.htmlBouddhisme_Noble_Sentier_Octuple.htmlBouddhisme_vue_juste.htmlBouddhisme_pensee_juste.htmlBouddhisme_attention_juste.htmlBouddhisme_parole_juste.htmlBouddhisme_action_juste.htmlBouddhisme_effort_juste.htmlBouddhisme_concentration_juste.htmlBouddhisme_moyens_existence_justes.htmlBouddhisme_moyens_existence_justes.htmlBouddhisme_et_paradoxes.htmlBouddhisme_et_paradoxes.htmlshapeimage_2_link_0shapeimage_2_link_1shapeimage_2_link_2shapeimage_2_link_3shapeimage_2_link_4shapeimage_2_link_5shapeimage_2_link_6shapeimage_2_link_7shapeimage_2_link_8shapeimage_2_link_9shapeimage_2_link_10shapeimage_2_link_11shapeimage_2_link_12shapeimage_2_link_13shapeimage_2_link_14