1. 5.Génocide et environnement



Dans la mesure où  le génocide se focalise sur des victimes qui sont bien souvent déjà en position de bouc-émissaire, on peut dire qu'il n'y a pas de génocide sans certaines formes de consentement social.

Consentement qui n'est pas toujours exprimé de manière ouverte ou directe.


L'ignorance des faits, à une époque où des caméras de télévision sont sur tous les terrains, la peur des représailles, le principe de non-ingérence, la lenteur et la longueurs des pourparlers, posent de nombreuses questions.

Lorsqu'en plus on découvre que dans pratiquement tous les massacres, les bourreaux profitent d'une aide "technique", de fournitures et d'armements de la part de nombreuses puissances étrangères, on peut se demander à qui profite le crime ?


Les répétitions historiques semblent confirmer que le génocide ne va pas sans une certaine approbation larvée qui l'autorise, ou en tout cas d'une absence de désapprobation ferme et manifeste. La politique de l'autruche.


5.1. L'attitude de l'environnement international :


On ne peut pas dire que le génocide Arménien ait été souhaité par les grandes puissances, mais les intérêts stratégiques primant sur le droit humain, rien n'a été fait pour éviter le drame.


Dès que commencèrent les massacres des Juifs en URSS et en Pologne, en 1941, les alliés, la Croix-Rouge, le Vatican étaient informés de la façon dont on traitait les Juifs.

La préoccupation était d'empêcher l'avancée des Allemands et de gagner la guerre.


Il semble facile d'imaginer les difficultés qu'auraient rencontrées les États s'ils avaient voulu intervenir en URSS et en Chine. La crainte de déclencher une guerre mondiale a quelque chose de dissuasif dans la tentation de s'ingérer dans certains massacres.


On a vu aussi comment "l'aide" Américaine s'est transformée en "fiasco" de part et d'autre au Vietnam. Cet échec n'a pas empêché de renouveler l'expérience au Cambodge.


Comment expliquer que le Soudan ait pu exterminer les Noubas, et extermine encore des gens qui refusent de se soumettre à la charia sans que quiconque intervienne ? Sans qu'il y ait poursuite ni sanction ?


Comment expliquer que nous échouions dans nos tentatives d'interventions : au Biafra; en Ethiopie, en Somalie, en Bosnie, au Rwanda, en Afghanistan, au Darfour, en Syrie etc... ?


Il y a l'aide humanitaire, mais allons nous nous contenter d'enterrer les morts et soigner les blessés après les massacres ?


5.2. Le génocide et la justice


Juridiquement et officiellement le seul génocide ayant donné et donnant encore lieu à des poursuites, à des procès, à des condamnations, à versement d'importantes réparations est le génocide des Juifs.

Les tortionnaires, les responsables, ont été traqués dans tous les pays du monde, avec l'aide de la police internationale. Ils ont été jugés en France, en Allemagne, en Israël.


Des tentatives d'inculpations ont commencé contre les responsables de la purification ethnique Yougoslaves. Mais avec beaucoup moins de publicité... de même  qu'un procès aurait commencé à Kigali le 06.04.1995, sans les leaders des massacres ! Procès interrompu pour cause de représailles.


Le massacre Arménien vient d'être reconnu génocide par la France (29.05.1998) va-t-il y avoir des poursuites, des condamnations des dirigeants Turcs, des exécutants Khurdes ?

Qui se préoccupe des dictateurs Khmers, des hauts fonctionnaires Chinois, de la famille présidentielle des Mille Collines ?


Doit-on attribuer ces différences au fait que le peuple Juif est important et puissant ? Que les communauté juives sont réparties dans le monde entier détenant des postes économiques et politiques clefs, ce qui leur permet de faire pression sur les différents États et  sur l'opinion internationale ?


Quelle communauté puissante revendique aujourd'hui le droit à la justice, à la différence, à réparation, pour les Arméniens, pour les Biafrais, les Noubas, les Tutsis, les Bosniaques ?


Les tributs Noubas avaient-elles les moyens de pression ou possédaient-elles des enjeux qui leur permettaient de nous mettre dans l'obligation d'intervenir, de réagir ?


Qui se charge d'arrêter et d'incarcérer Omar el-Béchir ou Kadafi(de son vivant) après condamnation par la Cour Internationale pour crimes contre l'humanité ?

Comment expliquer que Ratko Mladic a pu être en cavale 16 ans dans son propre pays, au sein de sa famille ?

Que fait on de Paul Kagamé au Rwanda ? ( le Monde du 30 09 2010)


La convention pour la prévention des génocides prévoit dans les articles 3 et 4, que les auteurs de génocides doivent être punis: on a condamné les hauts responsables nazis à mort ou à perpétuité, les officiers supérieurs allemands ou serbes, turcs ou khmers à de lourdes peines.


Mais les centaines de milliers d'hommes et de femmes qui ont contribué à l'arrestation, à la torture, à la déportation, ceux qui gardaient les prisonniers, qui entretenaient les fours ou les camps et les faisaient fonctionner, ceux qui jetaient les être humains dans les fours ou dans les fosses, ceux qui les détroussaient ou les violaient avant de les achever, ceux qui les fusillaient lorsqu'ils tentaient de s'échapper, tout ce petit personnel besogneux, sans qui les massacres n'auraient pas pu avoir lieu , a eu et a toujours  le droit de dormir en paix, en bons pères et bonnes mères de famille. Est ce normal ?


Il y a quelque chose qui m'échappe au niveau de la notion de justice et de responsabilité.


Si l'expérience de Milgram démontre un processus de mise en veilleuse de la conscience, dans le cadre de la soumission à l'autorité, cela exonère-t-il de rappeler la part de responsabilité de chacun et de condamner chacun en fonction de sa participation à l'extermination.

Si l'officier à donné un ordre, l'exécutant à tiré sur la gâchette 10 000 fois, a poussé dans le feu des milliers de personnes, a tranché des centaines de gorges, en toute impunité !


Suffit-il de dire " Mr le Juge je n'étais pas conscient de ce que je faisais quand j'égorgeais ces centaines de femmes et d'enfants, c'est le chef qui me l'avait demandé" pour avoir le droit de vivre en paix ?

Cela pose question, quand même ?


Dans l'article 5 il est écrit :" que les parties contractantes s'engagent à prendre les mesures législatives nécessaires pour assurer l'application des dispositions de la convention et prévoir les sanctions pénales efficaces frappant les coupables de génocide."


Qui signe les conventions, les oppresseurs au pouvoir ou les opprimés futurs génocidés ? Qui prend les mesures législatives, le pouvoir en place, et que se passe-t-il si le pouvoir en place est à l'origine du génocide ?


L'article 6 prévoit " que les personnes accusées de génocide seront traduites devant les tribunaux compétents de l'État sur le territoire duquel l'acte a été commis, ou devant la cour internationale qui sera compétente, à l'égard de celles des parties contractantes qui en auront reconnu le juridiction".


Peut-on demander aux Nigérians, aux Turcs, aux Chinois etc... de se juger eux-mêmes, avec leur propre appareil juridique ?


Faut-il demander au gouvernement Tutsi actuellement au pouvoir de juger les Hutus ? Avec quelle objectivité ?


Cela ne risque-t-il pas de nourrir ou d'exacerber les désirs de vengeance, des uns et des autres ?


Les opprimés, les minorités des pays qui ne sont pas contractants ou signataires n'ont ils pas aussi droit à une justice internationale ?  Qui décide pour eux  s'il y a ou non génocide ?


                Alors quelle justice et quand ?